23.12.08

les belles choses

moi qui ne suis pas aussi optimiste que certains de mes collègues sur l'évolution du monde, je voulais parler des quelques points qui me font plaisir dans le contemporain. ils ne sont pas originaux, et surtout, on les voit partout à la télé, je ne suis pas mieux informée que toi, cher lecteur, mais je me plais à faire des listes.
il y a l'élection de barack obama. ça ne changera peut-être rien, peut-être qu'il ne mettra pas la CMU aux états-unis et que l'éducation ne sera pas en si bon état que ça dans trois ans (même s'il essaie de copier l'école maternelle française avant son fracassement au fond du gouffre réformateur de nos contemporains gaulois). souvenons-nous un instant de catherine (katrina) et de la vaste majorité de personnes de peau noire écrasées par la catastrophe, du remplissage des prisons par des personnes de la même couleur en priorité et à plus de 80%, et puis il n'y a pas si longtemps de la ségrégation officielle qui marquait le pays qui vomit l'imaginaire collectif du monde post-... post-quoi d'ailleurs ? pas post-moderne, on l'aurait remarqué. post- .... post-ma naissance ? ça c'est sûr, mais ils avaient commencé avant. post-création du cinéma, on va dire, et migration des cerveaux là-bas pendant la dernière guerre, et migration dans l'autre sens avec le mac carthysme. c'est compliqué l'histoire idéologique. en tout cas, grâce à 24, et à son président noir depuis quelques saisons (et quel président ! rarement on vit président si humain et viril tout à la fois ! fendons-nous d'exclamation pour david palmer), remplacé par son frère noir, comme pour créer une de ces dynasties qu'affectionne ce grand pays de démocratie (démocratie : pays où la majorité et l'opposition, à un très haut niveau politique, se reproduisent de père en fille et de père en fils, sans aller dans les détails de liens cousinesques, de façon tout à fait ouverte et bien documentée, et très autorisée grâce à des instances de reproduction sociale fort efficace telles des grandes écoles --- d'ailleurs, le pouvoir se laisserait-il partager ? non. alors il est bien normal que ceux qui le portent soient obliger de le garder longtemps et de le transmettre à la chair de leur chair. la république bananière s'en différencie car (et là, cher lecteur, je te laisse le soin de remplir, car cet argumentaire m'est impossible à développer, je n'en sais mais)).
or donc, pour continuer mes réjouissances, il existe également des mouvements sociaux chez les voisins, à quelques mètres, dans un pays qui certes sent un peu la poussière (je me permets, j'ai visité et observé les comportements, vêtements et moustaches des hommes, particulièrement ringardes chez les plus de 30 ans (ce qui, je le répète, est jeune pour porter des costards en polymère et une moustache tombante, en ce siècle naissant). mais j'avais déjà noté dans les films que les modes en zone vers-balkanique était assez déprimantes) mais qui est finalement très proche de nous autres : la grèces. je ne suis pas ce qui se passe avec une attention soutenue, mais la destruction systématique de magasins de luxe, sans même leur cambriolage me réjouit (mais franchement, quel intérêt y aurait-il à posséder des montres abusivement chères ou des voitures de collection dans un monde comme le nôtre - déjà les pauvres conducteurs de 4x4 de nos villes, ces minables petits se(a)igneurs qui se comportent en roitelets de la route, d'un outil de distinction sociale ont fait un signe de vulgarité ostentatoire, alors comment rechercher encore l'objet qui différencie lorsque l'on est riche ? c'est d'une absurdité qui me semble si siècle dernier que je m'apitoie sur leurs neurones gonflés de graisses poly-insaturées (mais pas encore bio, parce qu'il n'y a pas la pub à la télé)). car les grecs n'hésitent pas à casser tout ça dans la joie et la violence trop longtemps contenues, et finalement, me réconcilient avec l'anarchisme dont je pensais qu'il ne m'allait pas au teint.
note un peu négative dans mon délire joyeux. lecture du livre qui compile des illustrations d'hara-kiri, et qui sort pour, je suppose, une dizaine d'années quelconque en forme de célébration. la sélection est étrange, car ne montre que les aspects de la provocation la plus vulgaire, sans tellement s'attacher aux travaux plus politiques et poétiques. je sais que le sexe était un sujet politique à l'époque, mais l'extraction de quelques éléments si directement tournés vers la monstration de zones érogènes sous toutes les formes a réussi à me lasser. connaissant une partie des documents originaux dans leur intégralité, je tiens à rappeler que le travail allait beaucoup plus loin que ça. un manque flagrant de dessins de reiser et de topor sont à déplorer (qui ne sont que très peu représentés). bref, je trouve peu représentatif le choix qui a été fait, mais je remercie quand même les auteurs de ces pages qui ont créé, pour moi, une mythologie toute particulière de l'opposition à la pensée dominante, d'une radicalité qu'on retrouve plus tard chez mon idole disparue, pierre desproges.
revenons aux plaisir de fin d'année, et la chaussure lancée sur g.w.b. bien sûr, c'est surtout le courage de ce journaliste, dont on se demande un peu ce qui a pu lui passer par la tête et dont j'aurais tout d'abord parier qu'il allait se prendre, dans un caboche justement, un chargeur bien plein de flingue de barbouze. et pourtant, il a bien exprimé un désaccord, et il n'aura que 15 ans de prison. je sais que l'opposition politique, dans de nombreux pays, coûte cher (et que ce sera bientôt le cas en gaule aussi). mais ce geste qui semble si futile et vaguement inefficace me touche particulièrement. surtout quand on sait que maintenant la mode est lancé et que le nec plus ultra des prochaines semaines sera de marcher dans les chaussures que portait cet homme (qui sont devenues des pièces à conviction, donc maintenant il porte des birkenstock offertes par un journaliste allemand en signe de soutien). le quart d'heure de célébrité qui coûte cher.
en gros, on peut voir que je me réjouis de plein de petites choses qui me semblent nous sortir de la routine télévisuelle de base, MAIS rien de tout cela en france. la crise mentale est toujours là, nous sommes des tristes et des peureux, et le secouage ne viendra pas en cette fin d'année, même si nos lycéens sont bien actifs en ce moment.
si tout continue à se réchauffer comme ça à l'international, par contre, je parie pour un printemps de fête. et souvenons-nous que les congés payés ont été faciles à instaurés car elles ont servi à arrêter les grèves de 36. on sait donc que si les vacances arrêtent les grèves générales, c'est qu'elles ont été conçues pour par les méchants capitalistes aux longues dents. d'ailleurs si vous voulez vérifier que la droite est plus maligne que ce que ses réformes destructrices de confiance dans le prochain et de tissu social laissent à penser, allez sur le site de l'élysée. je suis encore scotchée de sa qualité et de la déprime qu'il inspire (en même temps).

8.12.08

les recycleurs de rue

Je suis assez marquée par les reportages télévisuels en ce moment, principalement parce que dans ma bêtise contemporaine, je regarde beaucoup l'écran qui bouge tout seul et qui endort conséquemment les neurones. A l'instar de la publicité qui continue à exhiber une grande quantité de voitures et de produits de beauté pour pauvres, le reportage montre des régularités surprenantes. Je dirais, en gros, qu'on parle des ultra-riches et des populations à la limite et sous le seuil de pauvreté. Il n'y a pas tant de sujet autres concernant la France.
Hier, nous passions donc de Dubaï, où tout le monde était très excité par l'ouverture imminente d'un très grand hôtel, Atlantis, bâti autour d'un aquarium géant où se prélasse un adorable requin baleine adolescent nourri aux produits de la mer fraîchement sélectionnés. La femme du propriétaire, ancienne mannequin, se réjouissait en attendant d'enfiler sa robe pleine de paillettes chères. Les restaurateurs s'affolaient que leurs serveurs ne sachent expliquer la recette de la ratatouille, et le responsable des boissons n'avait pas reçu toute sa cargaison d'élixirs luxueux. L'on était bien bas mais encore stimulé par le stress, parmi ces personnalités à la réussite exubérante. Après, tout tournait autour d'un russe excité qui souhaitait jouer le héros devant sa dulcinée déjà conquise et parée pour la nuptialité.
Etrangement, j'avais du mal à sentir l'empathie nécessaire à ma concentration sur le sujet. Une forme de fadeur d'ennui me semble toujours suinter des amusements des riches, et j'ai du mal à entrer en vibration avec leurs libations.
Le reportage suivant m'a semblé plus porteur de thématiques touchantes, et ils s'agissait bien sûr de la deuxième extrémité de l'échelle des intérêts sociaux des grandes sociétés de production de l'écran sans fond. Les puces. Là où des petits font au quotidien vivre le commerce. Une étrange entreprise, où chacun prend des risques mesurés et étend doucement mais sûrement son emprise, en maîtrisant pas à pas de son développement. Et c'est ainsi que chez les plus pauvres, la récupération et la débrouille permettent de développer durablement (semble-t-il), et équitablement. Un grand entrepreneur, à l'échelle considérée, a monté un trafic honnête entre Tunisie et Paris en investissant 6000 euros qui se sont transformés en jeans et en sweat-shirt, classés selon plusieurs marques qui prétendent à la concurrence ("aux puces aussi on est au fait des techniques de marketing", dit-il). Les machines de l'usine sont vieilles, les tissus de récupération, les formes d'inspiration libre à partir des grandes marques. C'est une industrie qui n'existe donc qu'en creux de ceux qui ont innové et inventé la chaîne en premier, ont payé des créatifs et investi dans des machines qui tournaient rond (et certainement semblaient moins prêtes à exploser en projetant des aiguilles affutées en tout direction, mais les normes de sécurité varient d'un pays à l'autre). Pour être un chef d'entreprise, il faut cependant une énergie débordante, faire la surveillance des usines et l'entretien du moral des troupes, acheter le tissu (qu'il faut savoir identifier), décharger les cartons, vendre sur le marché en baragouinant dans une langue adaptée au client. Même si l'achat s'étend progressivement dans les boutiques environnantes et que la fonction "vendeur" se délocalise un peu en conséquence, on peut considérer qu'on a sous les yeux ce qui ressemblerait beaucoup à une chaîne courte du textile (un intermédiaire). Quand on plaint, légitimement, nos agriculteurs qui, s'ils veulent chaîner court, doivent savoir faire gestion et vente aguicheuse en sus d'un dur labeur terrestre, on note que les autres branches sont tout aussi dépendantes d'une inventivité et d'une énergie sans fin. On dira que c'est là le vrai commerce, viser une petit niche et l'investir du mieux que l'on peut, en la définissant et en rendant le client accro des produits y proposés et y définis par soi. On dira aussi que si la Chine veut supprimer le droit d'auteur, c'est bien parce que toute cette industrie ne fonctionne que si l'on copie sans souci les productions d'autres, chez qui la partition du travail et la spécialisation de chacun dans des corps de métier, est plus claires.
On vit d'autres narrations. Puis vint le tour du biffin. Hors du circuit, lui. Sans officialisation ni inscription. Pour lui, la baraka : point.
C'est un petit métier, qui se traduit un peu différemment dans notre ville du Sud, surtout parce que les lieux de vente doivent changer régulièrement (par exemple on y a mis des parkings ou des chantiers sans fin). Et aussi parce que les quartiers riches, ici, regorgent un peu moins que la capitale de poubelles débordant de mille feux. Les chiffonniers passent la nuit dans les poubelles, d'où ils reviennent exténués et hachés menus par la honte, la saleté, la fatigue. Le sous-prolétariat se lève ensuite à 7 heures pour s'aligner sur des rues où traînent leurs alter ego pas encore sdfisés, et avec qui quelques pièces s'échangent contre ces déchets revus à la hausse. Qu'on voit un produit rejeté devenir source de revenu est déjà assez désagréable, même si de nombreux films sur les poubelles du monde entier nous ont habitués à ce que pauvres et riches n'évaluent pas à l'identique le besoin de renouvellement de leur matériel quotidien. Plus violent encore est le retour de ce fonds de commerce au rôle d'ordure quand la police accourt, sommée par les sommets de nettoyer de la faune impure des zones mal sécurisées, et fait tout remettre là où le bourgeois et la société de c**on veut que le produit aille : la décharge, en passant par le camion-benne. A Marseille, sans cesse les vieux étaient délogés et perdaient leur butin. Maintenant leur marché fermé, ils sont, en bas de la rue d'Aubagne devenus très nombreux, mélangés qui plus est aux grands professionnels de cette activité que sont les migrants "roms" (s'ils le sont).
Vu depuis la population locale, une pratique courante revient à laisser les déchets qu'on envisage récupérables très visibles et loin d'une contamination de poubelle courante, pour faciliter le labeur des recycleurs des rues. Vu depuis le pouvoir en place, les difficultés qu'on leur fait sont peut-être justifiées, car ils sont si nombreux, dirait d'aucun, que l'ordre public pourrait en être troublé.
Ma question est : cela n'affole donc pas mon Etat et son gouvernement qu'ils soient si nombreux, d'une certaines façon si efficaces et créatifs, si utiles aux autres petites gens, et pourtant si empêchés, méprisés, sales, tristes, vieux prématurément, fragiles, exclus des règles de l'efficacité officielles, celle qui réduit le sens en augmentant la concentration de l'appareil productif (zet conséquemment de la récupération du profit) ? La grande pauvreté a toujours existé, mais en voyant que tant de parents se précipitent pour racheter des biens alimentaires non refrigérés et largement dépassés à des glaneurs de poubelles, je commence à frémir et à me demander si, finalement, les étudiants grecs n'ont pas un peu la bonne méthode de communication.

En passant, je dis bonjour à Paulo, mon lecteur du Nord, dont la fidélité ne m'a pas lâchée malgré l'irrégularité.

21.11.08

la rue

en bas du passage de lorette, une femme jeune mais énorme me demande de lui monter son panier. je me demande si j'aurais été ainsi interpellée si j'avais eu vingt ans de plus. j'espère dans tous les cas avoir plus de capacité de mouvement qu'elle en vieillissant, et même dans plus de 30 ans. Elle soufflait très fortement, au bord de l'étouffement, alors qu'elle n'avait pu se déplacer que sur une surface plane (vu l'environnement immédiat) et que son sac n'était pas très lourd. J'étais un peu triste pour elle et son handicap acquis. J'imagine bien qu'on peut voir un fait culturel dans le choix de la forme que l'on accepte, mais ça va un peu loin pour moi. Il est vrai que quand on mange en ayant une forme "mince", on a du mal à se projeter dans la consommation de nourriture d'une personne qui fait plus de deux fois son propre poids pour la même taille. Quelle vie quotidienne ? Je frémissais un peu.

En remontant vers le travail j'ai croisé un éminent collègue sociologue en train de frotter énergiquement les fenêtres de sa petite voiture. C'était assez rare et en même temps incongru. Donc forcément agréable.

20.11.08

l'absurdité 2013 : ça commence

Marseille 2013, vous connaissez ? une ville à la vie culturelle dynamique, mise en avant durant une année, sous la bénédiction du Parlement européen. Si l'on cherche quelques information sur la toile magique :
- wikipédia nous donne le but : « contribuer au rapprochement des peuples européens »
- le site d'inscription pour les villes françaises avec explication de la constitution du dossier nous informe du résultat : Lorsqu'une ville est nommée capitale européenne de la culture durant une année, des manifestations artistiques, des performances de toute culture s'y déroulent. (nda : est-il sous-entendu que d'habitude, non ?)
- ou, comme le dit directement le site de la Commision européenne : "La Capitale européenne de la culture constitue une opportunité inégalée de mettre en valeur la diversité de la richesse culturelle en Europe et les liens qui nous unissent en tant qu'Européens. Étant donné l'attrait que suscite cette manifestation, les villes européennes se disputent le titre avec ferveur."
- la notion d'éeuropéanité reste vague : "préparer un programme culturel remplissant des critères assez précis ayant trait à la dimension européenne de la manifestation et à la participation de ses citoyens. La dimension européenne s'illustre à travers les thèmes retenus et la coopération entre artistes et opérateurs culturels de différents pays amenés à travailler ensemble à l'occasion de la manifestation. Le programme doit en outre avoir des effets durables et contribuer au développement culturel, économique et social à long terme de la ville."

Après quelques minutes d'observation de ces sites, je n'ai toujours pas d'indication sur les critères de sélection précis ni le résultat réel (financement de projet, moyens débloqués pour valoriser la culture en général dans la ville ...).
Dans les discussions quotidiennes, ce à quoi chacun s'attend (sans y croire vraiment, mais il faut connaître ma ville pour comprendre), c'est à une redistribution de financements publics vers les acteurs de la vie culturelle de la ville. Ca semble envisageable, dira-t-on.
C'est pourquoi la mairie de Marseille a décidé de confier la campagne publicitaire de l'événement à une entreprise de communication parisienne.
(je n'aime pas ce type de procédé graphique mais ça semblait le seul point important du post).
C'est une riche idée. Cela rapproche les peuples d'Europe.
Mais est-il parfois arrivé que les structures institutionnelles de la capitale confie du travail à des entreprises marseillaises ? Je pense que rarement (comptons sur le doigt le plus à gauche de la main gauche). Alors comment dynamiser Marseille si les acteurs ne trouvent pas d'argent et que la mairie les prend pour des gogos incapables d'assumer un travail d'envergure ?
D'autant, que comme le rappelle la commission :
"Une étude réalisée par un expert indépendant sur les Capitales européennes de la culture entre 1995 et 2004 indique que la manifestation a suscité une réaction positive des médias, contribué au développement de la culture et du tourisme et amélioré l'image de la ville dans les yeux de ses citoyens. L 'UE souhaite que les prochaines Capitales développent plus encore les effets de long terme sur le développement culturel de la ville et des régions concernées.
La nouvelle procédure comprend également une importante phase de suivi après la désignation."
Evidemment, tout le monde notera que les diverses phrases copiées collées ici n'ont aucun sens. C'est pas faux. On ne sait pas ce qu'est une capitale européenne, à part un moyen de développer le tourisme. Donc : faire faire le logo par des parisiens et construire des hôtels de luxe pour vieux américains (les japonais ne viennent plus, le yen est trop faible).

7.10.08

mauvais esprit

mon employeur a changé de logo. il est bien entendu atrocement laid, bien pire que l'ancien qui avait un petit goût années 70 tout mignon (je ne sais réellement pas de quand il datait). le pire n'est bien sûr pas ce petit dessin hors de prix, mais l'accroche qui nous a été allouée. "dépasser les frontières". pour une institution attaquée de toute part, incapable d'employer les jeunes qu'elle forme et qui les oblige à partir à l'étranger pour croûter, je trouve ça d'un mauvais goût singulier.

dans la thématique du dépassement de frontières. au parc du XXVIeme centenaire, il y a beaucoup de petits enfants de toutes les couleurs qui jouent. plus ou moins petits, et surtout plus ou moins accompagnés de parents. dimanche, un groupe de petits garçons de 10 ans, à majorité noire. l'un d'entre eux dit à l'autre qu'on se tait "quand on n'a pas de papier. c'est pas moi qui suis venu à marseille à la nage". j'ai toujours été fascinée par les conflits au sein des minorités opprimées, je trouve que leurs parents pourraient leur apprendre des catégories un peu plus pertinentes pour décrire le monde.

17.9.08

vexée

Je lisais hier le courrier international (ce qui aurait pu me faire passer pour bobo il y a quelques années mais maintenant que tout le monde a arrêté de le lire parmi mes voisins et amis, c'est plutôt la preuve que je suis has been) et j'ai vécu un instant de grave humiliation. Je commençais un article sur le rire. Ce n'est pas vraiment une nouveauté pour moi, mais il semble qu'on ait de nouveau démontré dans un laboratoire de psychologie quelconque que le rire a une fonction de cohésion sociale et n'exprime pas seulement une réaction face à un événement drôle. Exemples, protocoles précis, avec humains et singes, et autres démonstrations. Au début de l'article, la blague fameuse : "deux muffins sont dans un four. le premier dit "oh la la qu'est-ce qu'il fait chaud ici" et le second s'écrit "oh un muffin qui parle"". Alors tandis qu'un bout de moi formulait très distinctement dans ma tête "ouah, j'adore cette blague, elle est trop drôle", un autre bout de moi continuait à lire la bafouille du journaliste (car je suis multitâche, par exemple je peux regarder les chiffres et les lettres en épluchant les patates et en discutant au téléphone, faire la vaisselle en chantant à tue-tête sur un clip vidéo, et je ne parle pas de toutes les circonstances complexes où je peux en plus mâcher un chewing-gum) et ce scribouillard dont l'histoire a déjà oublié le nom déclarait alors "j'espère que vous n'avez pas ri à cette blague minable".
Ca m'a vraiment vexée et je me demande si on a le droit d'écrire des paroles d'aussi mauvais goût dans des journaux.

Vie marseillaise. Je ne sais pas si vous prenez le métro en ce moment, mais depuis six mois, dès que je prends un transport en commun, je tombe sur des contrôleurs. Il y en a de plusieurs sortes, avec des uniformes gris, bleus, blancs, très divers, mais on les reconnaît bien par leur déplacement en troupeau et l'ustensile de contrôle, une petite boite noire qu'on imagine gavée d'électronique, et qui leur sert à tester les tickets. Pendant toutes les années précédentes, j'avais rencontré des contrôleurs trois fois en tout et pour tout, je n'ai pas d'interprétation sur leur soudaine apparition dans l'espace public. Avec tout cet argent dépensé pour leurs salaires, on ne pourrait pas bêtement rendre les transports en commun gratuits ? Je dis ça sans avoir aucune information quantitative sur les deux plateaux de la balance que j'énonce ici.

Avec la grande exposition à la Vieille Charité, on croise aussi plein de policiers en allant au travail. C'est pas que j'ai franchement un problème avec l'uniforme, mais presque, alors d'en voir partout dans la ville, ça me fatigue un peu. J'avais bien compris que c'est un choix politique contemporain, pas seulement de Celui-Qu'on-Ne-Peut-Pas-Nommer, mais qui s'étend à toutes les nations riches, mais est-ce une bonne façon de décorer les rues ?

10.9.08

la nuit marseillaise

Il y a un peu plus d'une semaine, le lundi 2 septembre, j'ai retrouvé des amis qui jouaient au paradox. C'était un mardi soir, en tout début de rentrée. Le concert était une improvisation suite à un désistement germanique (je crois) par manque de chance, et on y voyait trois groupes locaux de bonne qualité et sans aucun rapport les uns avec les autres : jours (en formation minimaliste, seulement clara et fred, voix douce et enthousiasme amusé, rigueur de la guitare, jolies mélodies), deschamps (qui réussit à faire des larsens au milieu desquels on entend encore une mélodie) et anything maria (étonnante présence scénique d'une post-punkette déguisée en petite japonaise mignonne).
La salle était pleine la plupart du temps, peuplée à craquer de gens beaux et branchés de tous les âges. Plusieurs remarques : étonnant de voir une soirée marseillaise en semaine aussi gaie, détendue, sans prétention, mais pleine de qualité musicale ; le début d'année ajoute à la surprise de tous les amis assemblés autour d'une table ; l'absence de fumée de cigarette est vraiment agréable pour la vie de nuit, on peut le dire : c'est la seule bonne chose qui nous soit arrivé dans le monde public depuis 1 an.

4.9.08

le magasin invisible

rue fontange, je vois un panneau dans une vitrine vide ouvrant sur un magasin en rénovation. "la vente de cierge d'hostie et d'objets religieux se poursuit au fond du magasin (prendre le couloir à droite)". et je découvre que dans cette rue il y a un magasin de rosaires, porte encens, prie-dieu, gourmettes de baptême, tableaux et cartes postales représentant un quelconque béatifié, vierges à l'enfant, chapelets, croix, crucifix, peut-être quelques fouets pour se purifier et quelques auréoles pour aller dans des fêtes très select. il faut que ça soit fermé pour que je remarque qu'on peut vendre ce type de produits, et à plus forte raison dans une rue que je fréquente avec une régularité absolue. en fait, c'est la deuxième fois que je découvre avec une surprise innocente qu'un magasin pareil existe, la dernière fois c'est miwako ma copine japonaise à qui je montrais la ville qui s'était arrêtée fascinée et avait pointé du doigt le collègue de mon voisin, plus proche de la rue de rome.
on est capable d'en rater des choses passionnantes...

3.9.08

économie

aujourd'hui, c'était la journée des histoires absurdes et je transmets brutalement.

une anecdote charmante narrée par Alan Kirman à la pause déjeuner. lors d'un colloque international d'économie il y a quelques années en russie à la cafétéria. il y avait deux possibilités pour payer son repas pour un participant ne possédant que des devises étrangères : soit payer directement en dollar, soit changer à un kiosque à l'entrée, de dollar en rouble, et payer en rouble. le taux de change implicite de la cafétéria était d'environ 1 dollar pour 500 roubles, tandis que le kiosque proposait un taux de change clairement affiché de 1 dollar pour 1000 roubles. Dans la queue, Alan a repéré au moins 3 prix Nobel d'économie (dont les noms resteront secrets à jamais) qui sont allés payer directement en dollar. faites leur confiance, après ça....

un collègue, p.b. (à qui je n'ai pas demandé l'autorisation de le citer) était en italie cet été et achetait son pastis en supermarché. commentant auprès de sa femme, il dit "c'est pas très intéressant finalement", puisque de la france à l'italie, on gagne deux euros sur quinze, ce qui ne rembourse pas le prix de l'essence pour traverser la frontière. il a alors été interpellé par un couple à l'air retraité et à l'accent de l'est de la france, dont le mari lui a expliqué que si si, c'est intéressant, puisqu'on paie en euros italiens et pas français. devant l'air étonné du collègue, le vieux a sorti un ticket de caisse en montrant la conversion de euro à lire en bas du document, ce qui pour lui prouvait bien qu'il ne s'agit pas des mêmes euros (puisqu'en france, la conversion est d'euros en francs, non ?). comme autre preuve il a aussi raconté une histoire de paiement en euros allemands un peu obscure. ici, implicitement, l'euro italien est plus bas et l'euro allemand est plus haut. après je m'étonne encore que malgré toutes les informations à la télé, beaucoup de français continuent à soutenir celui-qu'il-ne-faut-pas-nommer. c'est simplement qu'ils ne savent pas traiter les informations, ça ne va pas plus loin.

1.8.08

Lidl Bouddha

contexte de la journée : durant mon footing en atmosphère chaude et polluée du matin, j'ai croisé le canard idéal pour ma réincarnation au cas où je retombe dans ma montée vers le nirvana à cause de toutes les fautes et impuretés que je commets chaque jour (je sais que si on est politically correct, on ne parle pas avec légèreté des croyances religieuses, mais je ne le suis pas, justement). la raison de mon choix les couleurs. le canard avait le bec vert presque fluo, les pattes oranges pétant et le corps noir sobre. voilà comme je veux être dans ma prochaine vie.

et voici mon aventure du jour d'hier. j'ai ouvert le paquet que mon doux et tendre a acheté pour moi chez lidl, et sorti de ce carton un superbe bouddha de 25 cm de haut, en plâtre. mais ce n'est pas n'importe quel traitement du plâtre. ici, on a choisit "imitation vieille pierre", et il y a des défauts verdâtres pour signifier la fausse mousse posée sur quelques parties et des fissures comme une vieille statue laissée dans le jardin pendant des dizaines d'années. nous étions fascinés par tant de kitch, d'où un cri de mon doux : "ils sont trop forts les chinois". là, au niveau de la réalisation de produits manufacturés moches et de mauvais goût à bas prix, on fait difficilement mieux.
bien sûr, je ne recommande à personne l'achat d'un bouddha en plâtre ; par contre comme l'association d'idées à fait jour immédiatement, je recommande violemment l'achat de La Marie en plastique (Rabaté et Prudhomme, Futuropolis/Gallimard).

Hier aussi je me suis souvenu du petit bal perdu.

31.7.08

la tête de la fille

avant de commencer, une petite note pour mon demi fidèle lecteur (c'est le traitement que nous, économistes, réservons à une personne qui fait une action seulement un jour sur deux, nous le coupons en tranches grâce à l'usage subtil des probabilités) : hier c'était la sainte juliette, et je n'ai eu que deux sms. mais personne ne regarde la météo et les saints du lendemain à la télé ou quoi ?
bon.
ce matin, devant l'église du vieux port (qui a sûrement un nom), il y avait un tas de zonards habillés en vieilleries militaires. ce tas était constitué d'éléments plutôt jeunes et d'un vieux, un peu plus abîmé. ils avaient visiblement déjà ingéré des produits toxiques et cela forçait la plupart à rester assis, et rendait leur présence un peu vitreuse. un des jeunes gars aurait pu être assez beau avec ses yeux d'un bleu transparent et ses cheveux blonds presque frisés, un peu longs. mais visiblement, la vie qu'il mène avec ses amis lui a détruit suffisamment le quotidien pour que son regard soit vide et un peu effrayant de ce fait. il y avait un chien, et en tout cinq hommes, une seul debout titubant, les autres assis sur des sacs de couchage crasseux. derrière le potentiel joli garçon, une jeune femme brune était assise. vraiment jeune, plutôt une fille de fait, le visage bien bronzé, les cheveux lisses attachés en catogan, la main posée sur sa paume de main, et regardant plutôt le vide. sa présence semble incongrue, car elle n'a pas une tête de zonarde du tout, plutôt de jeune fille polie de classe moyenne qui n'a pas particulièrement besoin de se détacher de son groupe social ni de prouver au monde qu'elle est cool. on la voit bien à science po ou en étude de psycho. elle a l'air de s'ennuyer.
j'imagine qu'elle a rencontré ce type un peu séduisant au camping où elle était avec ses copines, et l'été aidant elle a décidé de le suivre, laissant les autres rentrer à la maison. maintenant, elle se demande comment elle va expliquer à ses amies qu'elle est tombé dans un plan nul et que ce type est un looser. oscillation entre ennui, intérêt sociologique et peur du ridicule.

30.7.08

un temps de fric

il est intéressant d'écouter les discussions dans la rue, parfois. d'autres fois, ce sont les conversations qui s'imposent à nous et qui sont plutôt fatigantes. nous avons un jardin. une courette pour être plus précise. celle-ci donne sur une allée bordée de végétation, dont elle est séparée par des canisses, et qui donne elle-même sur la rue. et il arrive souvent que des groupes de citadins, qu'on suppose sans jardin individuel, viennent dans notre allée déambuler. il y a quelques temps, un type charmant était assis devant le bassin aux poissons (et à grenouille), lisant une bande dessinée, pendant qu'un bambin ronflait dans sa poussette. il m'a dit habiter à proximité et venir profiter des poissons et du calme avec son fils. parfois, des bandes de jeunes viennent s'installer là pour se bécoter, boire de la bière, fumer de l'illicite. ceux-ci sont un peu plus embêtants car ils choisissent des horaires nocturnes pour s'adonner à leurs vices, ce qui peut gêner dans le sommeil. ils se font en général virer à coups de pieds dans le derrière par une bonne âme de l'immeuble. enfin, une nouvelle catégorie de visiteur, plus clairement ancré dans la pure nuisance, a fait son apparition hier. le promeneur de chien à téléphone. le bonhomme, à la voie plutôt jeune mais pas tant que ça, ce qui indiquait qu'il s'agissait d'un abruti et pas un adolescent peu conscient de l'usage de l'espace sonore, faisait des aller-retours dans l'allée, parlant au téléphone sur des sujets outrageusement insipides, nous imposant même des erreurs de numéros absolument pathétiques. son principal sujet de conversation : le forfait millenium qu'il utilise fièrement et ses relations avec son opérateur de téléphone. pendant qu'il devisait gaiement et longuement (une bonne demi-heure de conversations enchaînées) en citant des sommes d'argent à toutes les phrases, il laissait son chien caguer là où nous passons tous les matins. apparemment, la tendance contemporaine de la vie sociale se résumait bien dans le comportement décrit ici : je vous chie dessus et je ne pense qu'à mon fric. vive les forces de dissolution sociale en marche.

28.7.08

fortune cookies

chez mon traiteur chinois préféré, j'ai acquis deux fortune cookies par hasard. je ne décrirai pas ce hasard car il est trivial et futile, mais son résultat est épatant, car je pense devenir rapidement une accro aux fortune cookies. pas une accro pour le goût, je ne les ai même pas mangés car ils m'ont servi de dépannage pour l'apéro de mon fils, celui qui aime la nourriture plus que son papa, sa maman, sa nounou, la fille de sa nounou, ses grands-parents de sang et par alliance, ses oncles tantes et cousins, les vavas (animaux et machines mouvantes), le foot, spiderman, le jet de sable ou de gravier, l'eau qui coule, réunis. il a donc mangé les fortune cookies, mais moi je les ai ouverts et ai lu le petit texte.
description.
le fortune cookie est constitué de deux parties équivalentes à défaut d'être parfaitement identiques, de forme convexe avec une partie plutôt plane et une autre bombée. il est d'une couleur tendant sur le jaune et sa texture s'approche d'un sablé très fin. il est creux à l'intérieur et se brise aisément en son centre, lieu de réunion des deux parties. lors du bris, on récupère un papier de 1 cm sur 4 environ, dont chaque face est ornée d'un texte. d'un côté le texte en rouge est en chinois, de l'autre côté le texte en noir est en français. ou semble être en français d'après l'arrangement des lettres, mais je ne peux pas prouver cette hypothèse.
quand je me rendis propriétaire du fortune cookie (j'en ai acquis tous les droits, même celui de le détruire totalement ou au contraire de m'en servir comme compost ou monnaie d'échange, comme c'est bon la propriété privée), la dame m'a signalé que c'est un fortune cookie et devant mon air torve à ajouté : un porte-bonheur. en fait, j'ai fait semblant d'être bête car j'ai déjà entendu parlé du principe. une petite phrase qui oscille entre l'annonce d'une bonne nouvelle et un vieux proverbe qui aide à faire des choix dans la vie.
le premier fortune cookie va plutôt dans le sens de la nouvelle :
"Vous faites des jaloux à cause de votre personnalité."
il reste délicat de décider si c'est une bonne ou une mauvaise nouvelle, puisque faire des jaloux n'est pas quelque chose d'idéal, et "à cause" renforce cette idée, mais quand je me dis que la jalousie (qui serait, plus strictement, l'envie, je pense) est due à ma personnalité, c'est que je suis une personne trop chouette comme dirait le petit nicolas. donc, c'est une bonne nouvelle. voilà pour le premier fortune cookie.
déjà à ce stade, on comprend grâce à une unique interprétation de bon sens que je puisse devenir accro de ce type de lecture : je suis folle.
suite : le deuxième fortune cookie, qui va plutôt dans le sens du proverbe :
"Aucune main est pure quand le chef a changé."
déjà, là, ça devient plus complexe de décider du sens (je continue à supposer que c'est une traduction en français, jusqu'à preuve du contraire). je ne m'attarde pas sur les problèmes syntaxiques qui n'empêchent pas réellement de saisir la direction du discours. ce que je comprends, c'est que si le chef change, ceux qui l'ont suivi vont se faire couper les mains (ou zigouiller, ou mettre au placard, ou torturer, ou bannir, ou offrir un poste mirobolant si on a affaire à notre "celui qu'il ne faut pas nommer" contemporain, le roi du diviser pour mieux régner) par le nouveau. c'est un proverbe plein de bon sens, et qui me fait anticiper les retournements de politique sur mon lieu de travail dans les prochaines années.
on comprend mieux l'institution du fortune cookie quand on voit tous les amusements qu'on peut tirer pour 15 centimes d'euros, dans cette ère de vie chère.

22.7.08

extases

seules quelques personnes très sensibles pourront comprendre l'extase qui je connus de façon répétée en cette journée. ce matin, marchant tranquillement dans la rue, j'ai dégainé un paquet de granola, que j'ai savouré en évitant le soleil déjà chaud du matin (car chocolat et soleil, à l'instar de peau et soleil, ne sont pas amis tendres et chers).
arrivée au labo, j'ai ouvert le gros carton arrivé il y a peu, et découverte mon imac. je n'aime pas faire de pub, mais si on n'appelle pas un imac un imac, on ne peut pas comprendre ce qu'il y a de jouissif dans son déballage. je passe les détails techniques initiaux, pour parler du transfert de mes données, qui s'est fait sans y penser, grâce à un petit fil fire wire. le nouvel imac (gudule pour les intimes) a avalé toutes les données de shubaka (un gentil mac book pro très méritant). puis il a régurgité tout = connexion réseau déjà prête, tous les mots de passe et les identifiants de tous les sites oueb, mon livre d'adresses, mon calendrier, mes préférences. j'ai devant les yeux un jumeau un peu plus rapide. j'ai en plus, sachant que je ne veux pas me la jouer exhaustive car les forums sont là pour ça : leopard. et leopard, ça veut dire qu'on voit l'intérieur des fichiers sans les ouvrir, avec mail on peut faire des notes et des tâches comme un bloc-note, mais dans un des lieux qu'on fréquente en général assidûment (le mail). soudain, un nouvel espace quotidien, encore plus évident et ergonomique, s'ouvre à moi, tandis que plusieurs personnes que je connais tentent de revendre leur ordinateur sous vista, dégoûtés qu'ils sont de ne pouvoir utiliser une quelconque application.
alors, bien qu'il y ait des inégalités palpables dans ce monde, je suis joyeuse.
alors j'écris des messages insipides, mais qui me font oublier le monde pourri de la politique française et mon président qui n'a pas peur de se transformer en honte historique sur trois générations (après il sera largement oublié).

29.5.08

pourquoi faux ?

Parce que la traduction stupide et directe qui veut que le rythme du haiku soit 5-7-5 n'a aucune raison de s'adapter au français, traduction sans finesse d'un rythme japonais, mais que je me laisse quand même influencer.
Parce que les indications relatives à la saison, quand on habite au centre de Marseille, ne sont pas évidentes à percevoir. Saisons peu marquées du sud-est, grosse agglomération sans espaces verts et changement global, tout masque la cyclicité annuelle de notre vie. On verra que le remplissage des terrasses est un des bons indicateurs de la période, pas très buccolique.

(FH4)

le léger panier
au bout de la canne à pêche
du zonard bien cuit

(FH3)

Sous la fine pluie
le père crie, l'enfant crie et
la mère en sanglot

28.5.08

(FH2)

l'auto bleue évite
la mouette sur le gros rat mort
de froid cette nuit

dorénavant : faux haiku (FH1)

petit matin chaud
jaillit, innonde la rue
eau de la mairie

10.5.08

quand on est médecin

Quand on est médecin, il faut supporter
les plaies, le sang, les boutons, les organes génitaux (parfois infectés), les membres arrachés (ou autre partie manquante), les malformations, les dents cassées, les yeux crevés, l'haleine fétide, les corps mal lavés, les sécretions giclantes et suintantes, les cheveux filasses des vieux et des bébés, le caca des bébés et des vieux, les ulcères, les bosses au niveau des articulations, les goitres, les champignons entre les orteils, le prurit, l'eczema, les maladies dégénérescentes, les yeux qui louchent
mais aussi
les pleurs des familles, le regard du patient face à l'annonce de..., les petites vieilles qui squattent la salle d'attente, les chers confrères, les représentants pharmaceutiques, les nouvelles règles de la sécu, les déments, la sagesse de l'enfant en fin de vie, la surdité qui force à répéter, les cas sociaux qui ne peuvent jamais payer
et enfin
l'erreur médicale, l'appât du gain, la mort


c'est certainement un métier intéressant.

22.4.08

日本

Quelques rares personnes, moins rares que celles qui poseront les yeux sur ces lignes, mais tout de même une quantité négligeable en comparaison avec la population francophone, se souviennent que j'apprécie tout particulièrement être au Japon. Il se trouve que par chance, je suis en ce moment au pays du soleil blablabla et que je peux donc voir des carpes de la taille d'une cuisse de hell's angel s'ennuyer au fond d'un ruisseau vaseux. Car sans carpe, pas de Japon. Sans arbre à fleur et jolies feuilles rouges non plus. Sans vélo ni machine vendeuse de boissons, que dire ? Et sans masque à enrhumés, on n'imagine même pas.
Quelques éléments nouveaux dans le paysage : à la télé, on voit un reportage sur une jeune femme qui se promène en mini-jupe et string dans une rue de tokyo, et qui lève la jambe comme une danseuse devant des photographes amateurs sur-excités. Comme mon japonais ne permet pas de saisir les explications de la jeune femme, je reste incapable de vous donner ses motivations. Sa voix exprime un certain contentement. Je lis le journal et constate que, dans le Japan Times, la plupart de l'espace est consacré aux nouvelles internationales (par exemple, les chinois ont des parcs de protection et d'élevage de panda, dans lesquels ils leur font faire de l'exercice sexuel pour les pousser à se reproduire plus). Il reste quelques lignes sur Yasukuni Jinja et toutes les bonnes justifications sont données à la visite de nombreux membres du parlement à ce sanctuaire plutôt associé aux débordements nationalistes. Quelques tribunes sur le Tibet. Comme Nicolas S. ne fait pas de bêtise ridicule en ce moment, rien sur la France. Globalement, plutôt du fait divers ou de l'actualité brute, les colonnes de commentaires n'étant pas sur des sujets très nippons.
Pour les détails du quotidien : à l'université de Tsukuba, on croise des professeurs se cachant dans les recoins de couloir pour se laver les dents en paix. On pourrait se dire qu'ils ont l'air ridicule avec de la mouche qui sort de la bouche, mais a-t-on possiblement l'air bête quand on fait un geste d'hygiène de base dont on sait que presque personne ne l'accomplit après le repas du midi en France. Egalement, combien de français se lavent les mains avant de passer à table ? Personnellement, sur toutes les fois où j'ai mangé au restaurant avec des collègues ou des amis, je n'ai jamais vu personne me suivre vers les lavabos. On dit parfois que cela explique beaucoup les taux d'incidence de gastro.
Pour info, les cafeteria du campus de Tsukuba délivre une nourriture abjecte.
Pour info, les cours d'aikido de l'université de Tsukuba ont lieu tous les jours de 17h30 à 19h30 et certains sempai sont très sympathiques (je n'ai pas demandé à y aller, je n'avais même pas de keikogi, mais mon collègue, connaissant mon intérêt, a tout organisé pour qu'on me prête un gi et que je m'incruste au cours. J'ai finalement eu droit à une pratique particulière avec un ancien, troisième dan qui pratique depuis 17 ans, c'était très bien).
La pluie est arrivée après le beau temps. A la télé, toujours cette fascinante présentation du temps qui donne les probabilités de pluies dans chaque grande ville. Tout cela a à voir avec la langue japonaise elle-même, où les chances et risques s'expriment de façon très précise, chaque mot ayant un équivalent presque quantifiable en proba. Alors ils comprennent ce genre d'information. Pratique, mais sûrement pas adapté à la télé française.
Bonne nouvelle : je me rends compte que j'ai maintenant le niveau pour comprendre les infos à la télé et lire Yotsuba, manga pour enfants plutôt mignon.

1.4.08

jet yoyo

La chance de la semaine c'est de pouvoir passer de l'heure d'hiver à celle d'été puis en arrière et de nouveau en été. Comme un yoyo. En arrière, c'est en Angleterre, le beau pays vert pelouse où les petits moutons courent joyeusement dans les pattes de maman, où les contrôleurs de train ont parfois une dizaine de piercings sur le visage, où le poids moyen de tout individu de plus de quinze ans semble le double de celui d'un continental, où l'on vous appelle "love" quand on vous propose de choisir entre le thé et le café. Parlant de café, si la nourriture servie au centre de conférences de l'Université de Warwick est étonnamment bonne au vu du pays dans lequel ce centre est situé (rappel historique : talonnant la Pologne qui se situe sans conteste en première ligne, l'Angleterre est l'un des pays où l'on mange le plus mal en Europe), le café ne déroge pas à sa réputation et rejoint l'ignoble. Malgré ce léger défaut, le centre de conférences est un lieu paradisiaque, aux chambres majestueuses nettoyées tous les matins, au bar ouvert le soir et prêt à accueillir le pauvre voyageur jet yoyoté avec une guiness tirée hors des règles de l'art mais dont le goût est délicieux puisque l'on a passé le channel, où l'on peut prendre comme dessert du cheese cake ET du carrott cake ET de la salade de fruits, mais aussi où l'on pense à servir les petits bouts grillés de peau grasse détachée du jambon cuit qui est très laid à regarder et représente une charge calorique inacceptable pour un organisme sain mais qui fait le bonheur des gourmands, où l'on sert *oh bonheur suprême* des rognons délicatement cuits au petit déjeuner, où le wifi est accessible dans toutes les salles communes, où les salles de réunion contiennent un distributeur d'eau décore de bonbons violets de bonbons jaunes de bonbons verts de bonbons oranges qui chacuns ont des goût différents mais sans être associables à un fruits particulier, une prise réseau et un cable éthernet posés avec attention sur le bureau de la chambre, où chaque salle de bains contient savon gel-douche shampoing mouth-freshener (qui doit avoir une traduction en français) chapeau de douche coton-tige crème pour le corps, crème pour le corps que l'on retrouve dans les toilettes à côté du savon liquide dans sa version "crème pour les mains", toilettes où l'on a d'ailleurs le choix entre le séchage manuel sur papier ou le séchage électrique par ventilation, les salles de réunion ouvertes à tous les participants pour s'isoler, le prêt sans garantie d'un adaptateur électrique que l'on reçoit contre une recommandation "please bring it back when you are done with it", où un sèche cheveux une télé une bouilloire et un tas de sachets de thé café décaféiné tisanes ornent le long bureau, où l'on trouve même dans l'armoire des objets saugrenus et parfaitement inutiles tels qu'une table et un fer à repasser. Le seul petit défaut est le risque de se perdre entre les petits salons, la salle de jeux, l'internet café, le distributeur d'argent, la photocopieuse. A ce stade, on soupçonne que l'idée de rassembler tout l'essentiel d'un conférencier dans le même bâtiment découle de deux facteurs qui empêchent les braves travailleurs sortant de leurs réunions de satisfaire tous leurs besoins : le temps certainement horrible qui écrase le ciel local en hiver, et de l'isolement de l'université au milieu de la campagne, paradisiaque depuis hier puisque les fleurs y pointent et les petits moutons s'y ébattent.
Le lecteur pourrait légitimement se dire que je parle beaucoup des petits moutons. Il faut savoir que dans ma jeunesse, je m'étais crue capable de tout plaquer pour partir en Angleterre vivre au milieu de champs rasés de près par ces charmants mammifères peu alertes. Depuis, j'ai compris que de jolis paysages ne s'obtiennent qu'au prix d'une pluie agaçante et d'une solitude déprimante. Je préfère donc me délecter d'une opportunité comme celle que je connais aujourd'hui, voir les alentours de Coventry sous le soleil et lorsque la nature s'éveille à la sortie de l'hiver tout en travaillant dans des conditions optimales avec de brillants collègues.

17.3.08

la plage des sables d'olonne

Bien sûr que je suis tombée amoureuse d'Artémis. La fin du monde s'est invitée sur nos plages, et déjà les embouteillages de photographes épatés, venus d'aussi loin que Clermont-Ferrand, empêchent les gentils vendéens de promener le dimanche.
Merci Artémis pour ta beauté fragile, un peu étonnée.
Merci changement global pour tes blagues.

pour d'adorables lecteurs capables de me contacter : un grand bonheur pour moi serait de savoir comment sont désignés les habitants des sables d'olonne - suivant wikipédia, je trouve olonnais comme adjectif et olonnois comme substantif, sans savoir si cela désigne bien les sus-concernés - la page de wikipédia, qui ressemble singulièrement à une page web d'office du tourisme du début des années 2000 (interface anti-conviviale) ne sert pas à grand chose à part à connaître les horaires de train, à constater le dépeuplement depuis 1968 de cette belle ville et à lister de célèbres inconnus comme personnalités locales.